On vous dit que vous manquez de courage ? Et si votre style de leadership racontait une toute autre histoire !
CONSEIL
06/05/2025
Dans de nombreuses organisations, le courage managérial est associé à la fermeté, à la confrontation et à la capacité à “tapoter le poing sur la table” lorsque la situation l’exige. Certains managers incarnent parfaitement cette vision : ils n’ont aucune difficulté à affronter un collaborateur, à trancher un sujet sensible ou à mettre fin à une dérive comportementale.
Mais d’autres, tout aussi compétents, se sentent instinctivement plus attirés par la médiation, la diplomatie et la recherche d’un terrain d’entente. Leur priorité n’est pas d’imposer, mais de préserver la relation, d’éviter les tensions inutiles et de favoriser l’harmonie collective.
Ce second profil est souvent accusé — à tort — de “manquer de courage”.
Pourtant, ce diagnostic simpliste ne reflète ni la réalité de leurs compétences ni la valeur qu’ils apportent au collectif.
Et si, derrière cette accusation de manque de courage, se cachait en réalité une autre manière d’appréhender le monde, tout aussi légitime, puissante et utile à l’entreprise ?
En bref
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On ne “manque” pas de courage : on exprime un type d’appétence managériale, orientée vers l’affrontement ou vers la médiation.
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Les managers médiateurs ne sont pas moins courageux : ils possèdent une intelligence relationnelle très fine.
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Leur force : détecter très tôt les tensions, favoriser la cohésion et construire un climat de confiance durable.
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Leur défi : poser des limites claires et accepter d’être fermes lorsque la médiation ne suffit plus.
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Le courage peut s’incarner de multiples façons : confrontation, fermeté, médiation, clarté ou capacité à dire non.
1. D’où vient la perception du “manque de courage” ?
Dans l’imaginaire collectif, le courage managérial est associé à une forme de virilité décisionnelle :
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affronter,
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trancher,
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recadrer,
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imposer,
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sanctionner.
Les managers à l’aise avec la confrontation possèdent souvent une forte appétence pour la stratégie et la décision. Ils voient clairement la direction à prendre et ne redoutent pas de provoquer une tension pour avancer.
Face à eux, les collaborateurs médiateurs peuvent sembler hésitants, trop prudents, trop soucieux de préserver la relation. Pourtant, cette apparente hésitation est souvent le signe d’une lecture émotionnelle très fine de l’environnement.
La différence de perception provient d’un point clé :
⇒ certains voient le conflit comme un moteur d’avancement,
⇒ d’autres comme un risque pour le collectif.
L’un n’est pas supérieur à l’autre : ils sont complémentaires.
2. L’anecdote du GIGN : une leçon magistrale sur le courage
Lors d’une formation de négociation au GIGN, Franck Pierrot raconte qu’une personne avait écrit au tableau :
« La négociation, c’est pour ceux qui ont peur. »
À quoi il répondit :
« La négociation, c’est pour ceux qui ont peur de ce que peuvent faire ceux qui n’ont pas peur. »
Cette anecdote révèle une vérité profonde :
⇒ choisir la médiation n’est pas un acte de faiblesse, mais un acte de lucidité.
Négocier, apaiser, faire dialoguer, anticiper les tensions… demande une forme de courage différente, mais tout aussi essentielle.
3. La vraie force du manager médiateur
Les profils médiateurs possèdent des qualités rares et précieuses en entreprise :
✔️ Détection précoce des tensions
Les conflits leur sont insupportables. Ils les sentent venir bien avant les autres.
✔️ Vision globale du collectif
Ils évaluent les impacts sur l’ensemble de l’équipe avant de prendre la moindre décision.
✔️ Capacité à créer un climat stable
Ils savent fluidifier les interactions, prévenir les frictions et favoriser la collaboration.
✔️ Intelligence relationnelle élevée
Ils naviguent avec finesse dans les émotions des autres et ajustent leur communication.
Ces qualités, loin d’être de la faiblesse, constituent un levier puissant de performance collective.
4. Leur principale difficulté : la fermeté
Cette force devient parfois une fragilité :
⇒ la peur d’abîmer la relation peut empêcher de dire les choses clairement.
Résultat :
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décisions difficiles repoussées,
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manque de recadrage,
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ambiguïté dans les messages,
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sentiment de “manque de courage” perçu par l’équipe.
Pourtant, ce n’est pas un manque de courage :
→ c’est une peur des répercussions sur le collectif,
→ et une hyper-responsabilisation des émotions des autres.
Le défi n’est donc pas d’être courageux…
mais d’apprendre à poser des limites sans se sentir coupable.
5. Comment renforcer le courage managérial sans renier son style ?
Voici les leviers essentiels pour équilibrer médiation et fermeté.
1. Mettre en place un cadre clair
Un manager médiateur a besoin d’un système pour s’appuyer sur des règles plutôt que sur ses émotions.
Exemples :
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Définir un protocole en cas d’absentéisme non justifié.
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Clarifier les comportements attendus et non négociables.
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Énoncer explicitement le cadre de travail collectif.
Quand un collaborateur dépasse la limite, ce n’est plus un conflit personnel :
⇒ c’est simplement l’application du cadre établi.
2. S’entraîner à dire NON
Dire non à une demande :
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non urgente,
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non prioritaire,
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non pertinente,
permet de renforcer la clarté et l’autorité naturelle.
Commencer par des situations simples entraîne la posture pour les moments plus délicats.
3. Passer la main quand l’émotionnel est trop fort
Contrairement aux idées reçues, demander de l’aide n’est pas un aveu de faiblesse.
C’est un acte de responsabilité.
Solliciter :
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un N+1,
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un RH,
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un coach externe,
est souvent la meilleure décision pour éviter que la situation ne s’envenime.
4. Ne jamais renoncer à la médiation
Votre style n’est pas un défaut : c’est une ressource.
L’objectif n’est pas de devenir un manager qui “tape du poing”, mais un leader capable de :
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médiation quand c’est possible,
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fermeté quand c’est nécessaire.
La vraie puissance est dans la maîtrise des deux registres.
Conclusion
Être accusé de manquer de courage ne signifie pas que vous en manquez.
Cela révèle surtout un malentendu entre deux visions du leadership.
Les managers médiateurs possèdent une force précieuse : celle de maintenir la cohésion, la confiance et la performance collective.
Mais pour être pleinement efficaces, ils doivent apprendre à poser des limites, à être clairs, et à accepter que la fermeté fait partie de leur rôle — même si ce n’est pas leur mode naturel.
Le courage managérial ne s’exprime pas uniquement dans l’affrontement.
Il s’exprime dans la cohérence, la clarté et la capacité à tenir sa posture avec bienveillance.
FAQ
1. Un manager médiateur est-il moins efficace qu’un manager directif ?
Absolument pas. Il excelle dans la prévention des tensions, la cohésion et la performance collective.
2. Peut-on apprendre à être plus ferme ?
Oui, cela s’apprend grâce à un cadre clair, des routines de décision et l’entraînement au “non”.
3. Pourquoi les managers médiateurs sont-ils souvent mal compris ?
Parce que leur courage est discret, relationnel, et non spectaculaire. Il est pourtant essentiel.
4. Comment savoir si je suis trop conciliant ?
Si votre peur de blesser vous empêche d’être clair ou de poser des limites, c’est un signal à observer.