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Transformer le pouvoir pour ne pas être transformé par lui




MANAGEMENT

25/01/2024



Le pouvoir est de plus en plus réinterrogé dans l’entreprise, ou dans la société. Chacun aura son mot à dire, ou sa pierre à apporter à l’édifice, car chacun, d’une façon ou d’une autre, le pense, le vit, s’y heurte, en profite, le subit ou en joue. C’est une problématique récurrente, un mode de relation qui peut nous tendre, mais aussi nous supporter, car ce qui fait lien nécessite toujours une certaine tension.

Parti du fait qu’une once de pouvoir est intrinsèque à chaque type de relation, qu’en faire ? Nous expérimentons, nous essayons de modifier les bases pour nous moderniser. Nous transformons. Et nous nous transformons. Dans l’environnement, tout est mouvant, et c’est dans ce mouvement que nous essayons de révolutionner l’approche de certains concepts et que nous proclamons : « Feu l’autoritarisme. Exit les petits chefs. »

En voulant effacer les traces de pouvoir, nous oublions ses vertus ; en redonnant de l’élasticité aux liens, nous finissons par créer trop de mou.

Rappelons avant toute chose que, toute proportion gardée, ce n’est pas ce que nous faisons qui compte, mais l’intention avec laquelle nous faisons, c’est ce qui définit la valeur de nos actes… 

Le contrat de travail définit le « lien de subordination » : « (il) se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. » Cet engagement des deux parties doit desservir un objectif précis : aucun être humain n’étant omniscient, il faut pouvoir, dans une organisation, libérer certains de décisions, d’autres d’opérations. Une telle organisation vise à s’affranchir de certains actes afin de pouvoir se concentrer sur un panel de tâches à accomplir.

Alors qu’il pourrait être approché comme un lien de complémentarité, dans les faits le lien de subordination, même s’il repose sur l’adhésion des deux parties, établit, peut-être par nature dévoyée, une relation dissymétrique, plus ou moins marquée selon le type de pouvoir exercé. Certains extrémistes de la pensée pourraient militer pour un remplacement du mot « hiérarchie » par « complémentarité », car finalement, l’architecte et le maçon œuvrent ensemble pour bâtir, la réalisation de l’un n’étant pas grand-chose sans la réalisation de l’autre… Nous prônons une égalité : nous ne sommes pas, malheureusement, à égalité, mais nous sommes complémentaires, certains doués pour le terrain, d’autres pour la prise de décision, les uns pour motiver un groupe, les autres pour travailler seuls. C’est aussi au nom de cette complémentarité que le pouvoir ne peut pas être réparti uniformément, que la volonté d’une société plus horizontale, plus coopérative paraît aussi injuste que ne l’était la société autoritariste.

Nous sommes donc, d’une façon ou d’une autre, contraints de subir le pouvoir ou de l’assumer, contraints ou libres de, satisfaits ou résilients à le faire, en fonction de la perception depuis où nous nous trouvons.

De ce fait, il y a aussi autant de formes d’exercer le pouvoir que d’individus ayant le pouvoir, et différentes façons de l’obtenir.

Certains gravissent des échelons par leurs connaissances, ou leur capacité à embarquer des foules, à motiver, ce sont ceux les experts, les leaders charismatiques, qui voient leur pouvoir grandir au fur et à mesure qu’ils exercent, au fur et à mesure qu’ils font grandir leur projet, leur entreprise, leurs collaborateurs. D’autres atterrissent par parachutage. Cette voie, qui ne présage pas des qualités du futur chef, présente l’inconvénient d’un manque de connaissance du terrain, néanmoins le leader pourra faire valoir sa vue du haut.

A ce stade de prise d’altitude, plusieurs risques se présentent… Les alpinistes parleront de l’ivresse des sommets, de l’hypoxie qui vient troubler les perceptions du réel et les prises de décision.

Nous le savons, le pouvoir est grisant, et gagner des avantages augmente la confiance en soi, le sentiment de puissance. Pour Kant, la « la possession du pouvoir corrompt inévitablement le libre jugement de la raison ».

Pour celui qui aurait comme principale source de plaisir leur satisfaction personnelle, le pouvoir est dangereux. Il active alors les réseaux de la satisfaction immédiate du cerveau, et nous le savons, ce sont ces circuits qui provoquent le besoin renouvelé de satisfaire l’envie, et finalement un besoin de toujours davantage, et, comme pour les addictions, une tendance grandissante à la prise de risque, une déconnexion des réalités. Le pouvoir joue sur la dopamine, il l’augmente, provoquant l’amélioration de la confiance en soi, si l’individu souffre d’un déficit d’estime de soi, le pouvoir devient une drogue, il devient une fin en soi. En alpinisme, quand la tête vacille, les jambes n’ont qu’à prendre le relais pour ramener à des altitudes plus basses, ou c’est l’œdème cérébral.

Heureusement, cela ne concerne pas tous les leaders. Nous aurions sinon davantage d’hôpitaux, et moins d’entreprises.

Être leader, c’est mener un projet qui inclut un collectif, et avoir un désir de puissance, non pour soi, mais pour ce projet. De ce fait, le collectif est inclus dans cette vision, c’est par la performance et l’élévation du collectif que le leader pourra atteindre ses sommets. Et c’est là le pouvoir, dans l’essence pure, du leader : avoir une vision, et faire grandir un collectif pour desservir un projet qui sera plus grand que la somme des énergies présentes. Le pouvoir, dans sa définition, est la possibilité de faire, non l’autorité sur. Le grand leader est donc celui qui a une hauteur de vue, une capacité à englober tous les éléments, mouvants, de l’environnement. C’est en ce sens que nous évoquons de plus en plus les leaders empathiques.

C’est cette direction que la société tend à prendre ces dernières années. Nous vantons la bienveillance, l’épanouissement au travail, la liberté de chacun à prendre sa place. Ces valeurs ne doivent pas nous amener sur un chemin de traverse : il ne s’agit pas de se disperser au titre de la satisfaction individuelle immédiate de chacun des salariés, mais bien de faire-valoir les complémentarités et l’engagement de chacun pour construire collectivement. 






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